Quel roman que ma vie! », dit un jour Napoléon en évoquant sa fabuleuse destinée. Par un de ces miracles étranges de l'Histoire, la patrie de Bonaparte devenait française un an avant sa naissance, et, si sa petite enfance reste encore pleine d'ombres, on voit sans déplaisir l'adolescent se tourner vers la France pour y poursuivre ses études, à Autun, à Brienne, à Paris. Années fécondes, années studieuses : le jeune sous-lieutenant d'artillerie qui sort des écoles a fait son apprentissage d'homme.

Une première action d'éclat à Toulon : il est nommé général à vingt-quatre ans. Mais les gouvernements de la Révolution, si prompts à mettre en avant leurs officiers, s'inquiètent aussi de leur élévation trop rapide. C'est alors que le jeune Corse famé-
lique au teint jaune, aux cheveux trop longs, bat le pavé de Paris, en attendant d'être distingué par Barras et de mitrailler les émeutiers du 13-Vendémiaire. La fortune sourit dès lors à ses avances : à peine marié à Joséphine, il s'élance vers les plaines d'Italie; la fulgurante campagne restera son plus beau souvenir. Acclamé par Paris à son retour, il est jalousé par les membres du Directoire, que trouble cette gloire inopportune. Ils l'envoient en Egypte : le mirage de l'Orient séduit le nouvel Alexandre, toujours vainqueur.

Le coup d'État de Brumaire entraîne la fin de la république. Le Premier consul réorganise le pays, rétablit l'union, repousse les avances des Bourbons, s'entend avec le pape. Prodigieux remaniement de la France [...]