C'est devenu un lieu commun d'évoquer la destruction de Bruxelles et l'incohérence de son développement. Faute d'une vision globale et d'un projet culturel, notre ville s'est modifiée au gré de la conjoncture et des opportunités immobilières ponctuelles sans que ne soit suffisamment prise en compte l'importance de ces ensembles architecturaux qui composent bon nombre de nos quartiers. Certes, nous extasions-nous sans réserve devant certains immeubles, monuments ou édifices dont la qualité et l'histoire les mettent généralement à l'abri de toute dégradation ou destruction.

Mais garder une âme et une image à une ville ne consiste pas à se donner bonne conscience par la préservation d'éléments de qualité, dispersés ci et là, et qui ne compensent guère les effets pervers, pour l'ambiance urbaine, de la monotonie architecturale, des ruptures d'échelle ou de l'aménagement d'espaces publics conçus à des fins essentiellement fonctionnelles.

Ainsi, la commune de Saint-Gilles se distingue-t-elle par l'existence de quartiers dont la qualité réside surtout dans le caractère d'ensemble et l'unité de leur parc immobilier, sans qu'il soit toujours possible de considérer chaque immeuble, chaque élément de ces ensembles, comme dignes de grande valeur.

Unité dans la diversité, échelle humaine, équilibre des volumes, personnalisation de l'habitat font la richesse de notre patrimoine bâti.

Ce n'est pas un hasard si le défi de la rénovation a été relevé depuis quelques années et avec succès. Notre parc immobilier a des atouts qu'il faut optimaliser et qui répondent à une demande sans cesse croissante de la part de ceux qui ont décidé de vivre ou de revivre en ville.

Aussi, tout en renforçant l'attractivité économique de certains quartiers en y favorisant l'implantation d'activités nouvelles, convient-il de protéger les caractéristiques architecturales de ces autres quartiers qui font le charme de la ville et sa grande chance de repeuplement.

Bordée par des zones dont le développement tertiaire se confirme, Saint-Gilles se doit d'assurer le maintien et le renforcement du logement au centre même de son territoire, là où se créent l'animation commerciale et culturelle ainsi que les relations sociales et cette convivialité urbaine qu'une certaine structure d'habitat rend possible et encourage.

L'étude réalisée par l'Eru nous permet cette lecture d'un Saint-Gilles dont l'architecture frappe autant par l'originalité de ses formes et de son image que par l'unité d'ensemble qu'elle inspire.

Commune qui se construit un avenir, commune qui lutte comme d'autres à Bruxelles contre le pourrissement du centre urbain, Saint-Gilles devra peut-être aussi son redressement à la manière dont elle aura su préserver et réhabiliter un tissu bâti dont on finira par se rendre compte qu'il est le seul qui donne le goût de vivre en ville.