Un article écrit pour la revue Hainaut-Tourisme en 1978 et un reportage télévisé effectué en août 1979 sous la conduite d’André Prévôt ont fait naître l’idée de cette monographie qui n’a pas la prétention d’être exhaustive mais souhaite attirer l’attention du lecteur sur le multiple intérêt qu’offrent les fermes anciennes du Hainaut. « Ce que les voyageurs qui en sont dignes demandent au voyage, écrivait Lucien Christophe, c’est de leur livrer le parfum d’une civilisation, l’essence même du pays dont ils foulent le sol. » Or, la civilisation ne se confond que très partiellement avec Athènes, Rome ou Paris. Elle n’est pas seulement issue du creuset des villes. Elle est également sortie de ces nids enracinés dans la glèbe, les fermes, qui n’ont cessé d’être à l’origine de la féconde magie des saisons. Aller vers ces témoins, c’est parcourir la campagne, découvrir ses attraits et renouer avec les valeurs oubliées, ou méconnues, d’un art de vivre, d’agir et de penser établi sur la permanence.

Pour réaliser le présent travail, nous avons marché sur d'innombrables chemins bétonnés, pavés ou tracés dans un sol souvent boueux. Et nous nous sommes basés sur différents ouvrages, dont ceux relatifs au Patrimoine monumental de la Belgique édités — à l’initiative du Ministère de la Culture française — par SOLEDI (P. Mardaga), ainsi que sur un très précieux Inventaire des Bâtiments de Fermes à Caractère monumental ou historique établi, à l’invitation de la Fédération du Tourisme de la Province de Hainaut, par M. Frantz Neerdal, Conseiller agricole - Directeur de l’Office provincial de Promotion agricole du Hainaut. Nous tenons, au seuil de cet ouvrage, à exprimer notre vive et profonde gratitude à ce technicien averti et sensible à cette forme d’humanisme qui fait référence à la paysannerie et au génie de l’univers le plus authentique qui soit, celui de la nature.

Dans un article donné en avril 1978 à Hainaut-Tourisme, M. Frantz Neerdal faisait opportunément remarquer que, si l'industrie a marqué le paysage hennuyer, près des deux tiers de la superficie totale de la province sont dédiés à l’agriculture. Et il concluait sa brève étude panoramique en affirmant que « tant sur le plan humain que sur les plans technique et économique, l’agriculture revêt, en province de Hainaut, une importance certaine, souvent sous-estimée.»

Voilà qui, peut-être, ouvrira les yeux à certains ! Voilà qui propose, du Hainaut, une vision non pas neuve mais trop fréquemment négligée, ou ignorée, celle d’une province végétale, soumise à la loi magnifique du perpétuel renouveau des sèves et sans cesse fidèle à la volonté de l’homme champêtre ! Et voilà qui nous oblige à évoquer le passé et à montrer combien reste vigoureuse une tradition dont le point de départ se situe extrêmement loin dans le temps !

C’est apparemment vers l’an 4000 avant notre ère que l’homme du Hainaut, resté jusqu’alors au stade de la cueillette et de la chasse, s’est métamorphosé en un être capable de sélectionner les graminées sauvages, d’ensemencer les terres et de se livrer à l’élevage. On a découvert, dans la région d'Ath, notamment à Givry et à Blicquy, les vestiges de communautés agricoles du [...]