Célébrer l'anniversaire d'un monument, c'est aussi en écrire l'histoire, c'est tenter de le reconstituer dans le temps et dans l'espace, d'en ressusciter les auteurs, d'en rechercher les fondements humains et objectifs, d'en inventorier les étapes. C'est d'abord en rencontrer l'âme.

L'église cathédrale de Malmedy, dont nous fêtons le 2e centenaire, se dresse, non au centre de la ville, mais au pied du socle rocheux qui sépare Warche et Warchenne, avant leur réunion. Elle se dresse à l'endroit où saint Remacle et ses premiers compagnons ont décidé de se fixer pour répondre à la mission que le roi mérovingien leur avait confiée en 648 : planter la croix dans les vallées, sur les collines et dans les cœurs, en l'honneur des saints Pierre et Paul.

Le voyageur la découvre et le fidèle la retrouve. Elle surprend et elle appelle, altière et fascinante. Elle invite et elle protège, douce et lumineuse, sereine et puissante, belle et noble, simplement belle et vraiment noble.

Les moines qui en ont voulu l'édification cinq années avant qu'éclate la révolution à Paris et que leur fondation millénaire bascule dans les séismes d'autres temps, se doutaient-ils qu'ils s'étaient chargés de nous confier, avant la tragédie et pour les nouveaux siècles, un témoin de si haute dignité, de foi si convaincue, d'espoir toujours si réconfortant, de stature si exaltante ? Dans son ombre et dans ses murs, les enfants sont nés et ont été baptisés, les fiancés se sont unis, dans la joie ; les vivants sont morts apaisés et les morts ont été enterrés, dans la peine ; les armées d'Europe et d'Amérique ont passé, détruit et tué ; mais le temple a gardé ses portes ouvertes à tous ceux qui désiraient lui apporter leurs larmes ou leur fête.
Les diplomates du Congrès de Vienne et du traité de Versailles y ont pensé et s'en sont servi.

Le bronze de ses lourdes cloches a sonné alerte et glas, son carillon a tinté et réjoui et, pour demeurer avec nous, ses tours ont défié le fer et le feu.

Elle est restée, loin des secousses, étrangère aux fissures, fidèle à son destin, mémoire et vigie, assurance et bénédiction.
Rassemblons-nous tous sous ses voûtes.

Entourons sa chère présence d'admiration et de respect, de notre affection aussi.

Entonnons pour elle et pour ceux qui l'ont donnée, en ces jours solennels, l'hymne de joie et de gratitude !