Jean-Pierre Ducastelle fait remarquer : « L’archéologie industrielle est à la mode depuis que le sauvetage du Grand-Hornu a attiré l'attention du public sur l’intérêt des anciens bâtiments industriels tant au point de vue documentaire qu’artistique » (1).

En tant que discipline annexe de l’histoire, de l’ethnologie et de la sociologie, l’archéologie industrielle n’a guère de passé. En Belgique, ce n’est que vers la fin de la décennie 1960-1970 que l’expression, communément utilisée aujourd’hui, est apparue. Elle s’est effectivement imposée à l’occasion de l’événement évoqué par Jean-Pierre Ducastelle, lorsqu’il a été question de sacrifier, à la pioche du démolisseur, l’admirable abbaye industrielle, l’extraordinaire complexe intégré et urbanisé du Grand-Hornu victime, alors, de l’abandon et d’un scandaleux délabrement. « Au moment où j’écris ces lignes, notait Pierre Puttemans en juin 1971 (2), la destruction du Grand-Hornu est quasi certaine. Ainsi, cette version belge des Salines d’Arc-Senans, le seul équivalent à ma connaissance des œuvres des visionnaires français de la fin du 18e et du début du 19e siècle, cette préfiguration des grandes œuvres d’urbanisme et d’architecture de notre temps, ainsi le Grand-Hornu n'aura-t-il pas échappé à la bêtise et à l’avidité des spéculateurs... ».

D’autres cris d’alarme avaient été lancés auparavant. Ils devaient, avec celui de Pierre Puttemans, susciter une tardive prise de conscience. Toutefois, ce n’est qu’après le sauvetage du prodigieux ensemble borain exprimant « la puissance associée à la recherche esthétique
du style » (3) que la formule de I’« archéologie industrielle » s’est généralisée chez nous. Il a cependant fallu attendre jusqu’en mai 1973 la création d’un Centre d’Archéologie industrielle. Par ailleurs, ce n’est qu’à la fin de 1975 qu’a été organisée, conjointement par la Société nationale de Crédit à l’Industrie et le Crédit communal de Belgique, la première exposition consacrée à ce thème, exposition présentant un panorama historique de l’archéologie industrielle, procédant à un large inventaire des témoignages permettant encore l’étude du phénomène et proposant un programme d’action en vue de la conservation des sites et monuments les plus caractéristiques. Enfin, ce n’est qu’en 1979 qu’a vu le jour, à Bruxelles, une revue : Technologia Bruxellensis, exclusivement dédiée à l’histoire des sciences et des techniques ainsi qu’à l’archéologie industrielle.